Face à la raréfaction des ressources en eau et à l'augmentation des coûts de l'eau potable (le prix moyen du m³ d'eau en France est d'environ 4€), la récupération d'eau de pluie représente une solution écologique et économique de plus en plus attractive. En 2023, plus de 10% des foyers français ont déjà installé un système de récupération d'eau de pluie. Cependant, cette pratique est soumise à une réglementation complexe, variable selon les régions et les usages prévus.
Ce guide complet vous apportera toutes les informations nécessaires pour installer un système de récupération d'eau de pluie en toute conformité, en vous expliquant les aspects légaux, techniques et sanitaires.
Cadre légal national : une législation indirecte
La France ne dispose pas de réglementation spécifique et unifiée concernant la récupération d'eau de pluie. La législation s'appuie principalement sur la Loi sur l'eau et les milieux aquatiques (LEMA) de 2006 et sur des réglementations annexes.
La loi sur l'eau et les milieux aquatiques (LEMA)
La LEMA, dont l'objectif principal est la gestion durable de la ressource en eau, encadre implicitement la récupération d'eau de pluie. Plusieurs articles, notamment ceux relatifs à la prévention des pollutions et à la protection des milieux aquatiques, s'appliquent indirectement aux installations de récupération d'eau pluviale. Il convient de se référer aux articles L. 211-1 et suivants du code de l'environnement.
Réglementations annexes et normes
D'autres réglementations influencent la mise en place d'un système de récupération d'eau de pluie :
- Le Code de la santé publique : concernant la qualité de l'eau et les risques sanitaires liés à son utilisation.
- Le Code de la construction et de l'habitation : pour les aspects liés aux travaux de construction ou de rénovation.
- Les normes NF EN 12056-2 et NF EN 12056-3 : relatives aux dispositifs de collecte des eaux de pluie.
- La norme NF EN 1717 : concernant la protection contre le reflux d'eau contaminée dans les réseaux d'alimentation en eau potable.
Réglementation locale : des variations importantes
La réglementation concernant la récupération d'eau de pluie varie considérablement d'une commune à l'autre. Les maires et les intercommunalités possèdent des pouvoirs importants en matière de gestion de l'eau et peuvent imposer des règles spécifiques.
Le rôle des communes et intercommunalités
Avant toute installation, il est crucial de contacter votre mairie ou votre intercommunalité. Ils pourront vous fournir les informations essentielles sur la réglementation locale : autorisations nécessaires (déclaration préalable, permis de construire), volumes autorisés, restrictions d'utilisation (arrosage, nettoyage, alimentation de sanitaires…), et éventuelles aides financières.
Exemples de réglementations locales et leurs implications
Certaines communes autorisent la récupération d'eau de pluie sans aucune formalité, tandis que d'autres exigent des autorisations préalables, parfois assorties de conditions strictes. Le volume de stockage autorisé peut être limité (ex: 1000 litres pour une habitation individuelle dans certaines communes). Il est fréquent de trouver des restrictions sur les usages de l'eau récupérée, notamment l'interdiction d'alimentation en eau potable ou l'obligation de traitement pour certaines utilisations sanitaires.
- Exemple 1 (Commune A): Autorisation obligatoire pour toute capacité de stockage supérieure à 5000 litres.
- Exemple 2 (Commune B): Interdiction d'utiliser l'eau de pluie pour l'alimentation des sanitaires sans système de traitement certifié.
- Exemple 3 (Commune C): Subventions municipales pour l'achat et l'installation de récupérateurs d'eau de pluie.
Le schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE)
Le SAGE, élaboré à l'échelle d'un bassin versant, définit les objectifs de gestion de l'eau. Il peut influencer la réglementation locale, notamment en encourageant les pratiques de récupération d'eau de pluie pour une meilleure gestion des ressources.
Usages de l'eau de pluie et réglementations spécifiques
Les réglementations relatives à la récupération d'eau de pluie varient selon l'usage prévu. Certains usages sont plus encadrés que d'autres du fait de risques sanitaires potentiels.
Arrosage des jardins et espaces verts : un usage courant
L'arrosage des jardins est l'usage le plus répandu de l'eau de pluie récupérée. Il est généralement autorisé sans restrictions importantes, sauf en période de sécheresse où des arrêtés préfectoraux peuvent limiter ou interdire l'arrosage, quelle que soit la source d'eau.
Alimentation des sanitaires : précautions sanitaires obligatoires
L'utilisation de l'eau de pluie pour alimenter les toilettes ou les machines à laver est de plus en plus fréquente. Cependant, des précautions sanitaires sont essentielles. L'eau doit être filtrée (avec un filtre de 5 à 20 microns minimum, selon l'usage) pour éliminer les impuretés et les risques de contamination. Dans certaines communes, l'utilisation d'un système de traitement spécifique est obligatoire.
Eau potable : strictement interdit sans traitement
Il est absolument interdit d'utiliser de l'eau de pluie non traitée pour la consommation humaine. L'eau de pluie brute peut contenir des bactéries, virus et parasites dangereux pour la santé. Seul un système de potabilisation conforme aux normes en vigueur peut rendre l'eau potable.
Usage industriel ou agricole : réglementation spécifique
L'utilisation d'eau de pluie dans le cadre d'activités industrielles ou agricoles est soumise à des réglementations spécifiques plus complexes et dépendantes du secteur d'activité. Des autorisations spécifiques auprès des services compétents (préfecture, DDT...) sont souvent nécessaires.
Aspects sanitaires et sécurité : des points essentiels
La qualité de l'eau récupérée et la sécurité de l'installation sont des aspects primordiaux. Un entretien régulier et un choix judicieux des équipements sont nécessaires pour éviter tout risque.
Risques de contamination de l'eau de pluie
L'eau de pluie, avant collecte, peut être contaminée par divers polluants atmosphériques (particules fines, pollens, métaux lourds...), des produits phytosanitaires ou des déchets organiques. Un système de filtration approprié et un entretien régulier de la surface de collecte et des canalisations sont donc indispensables.
Normes sanitaires applicables aux usages non-potables
Pour les usages non-potables (arrosage, sanitaires...), la qualité de l'eau doit être contrôlée et adaptée à l'usage. La norme NF EN 1717 est essentielle pour prévenir le reflux d'eau contaminée dans le réseau d'alimentation en eau potable. Un filtre à 5 microns est généralement recommandé pour l'alimentation des toilettes, mais un filtre plus performant (20 microns) peut être nécessaire pour les machines à laver.
Entretien régulier du système de récupération
L'entretien régulier du système (nettoyage des gouttières, des filtres, du réservoir...) est crucial pour prévenir la prolifération de bactéries et la dégradation de la qualité de l'eau. Un nettoyage annuel est recommandé, et plus fréquent en cas de forte pollution atmosphérique.
Le volume moyen d'eau récupérée par an pour une habitation individuelle avec une surface de toit de 100m² est d'environ 10 000 litres.Démarches administratives et autorisations
Avant d'installer un système de récupération d'eau de pluie, vous devez accomplir les démarches administratives nécessaires. La complexité de ces démarches dépendra de votre projet et de la réglementation locale.
Déclaration préalable ou permis de construire ?
Selon la taille et la nature de votre installation (capacité de stockage, travaux de construction associés...), une déclaration préalable de travaux ou un permis de construire peut être nécessaire. Renseignez-vous auprès de votre mairie pour connaître les obligations réglementaires.
Documents à fournir aux autorités
Pour les demandes d'autorisation, vous devrez fournir divers documents : plans de l'installation, devis des travaux, justificatifs de conformité aux normes en vigueur, etc. Consultez le service urbanisme de votre commune pour obtenir la liste précise des documents requis.
Contacter les services compétents : mairie, service de l'eau
N'hésitez pas à contacter les services compétents de votre mairie (service urbanisme, service de l'eau) pour obtenir des informations personnalisées et des conseils sur les démarches à effectuer.
La récupération d'eau de pluie offre des avantages considérables, mais une connaissance précise de la réglementation est indispensable pour une installation conforme et sécurisée. N'oubliez pas que le non-respect de la législation peut entraîner des sanctions.